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samedi 15 février 2020

Diagnostic sur le flétrissement des bananiers à Banakélédaga


Contexte
Un reportage de la Radio Télévision du Burkina (RTB) diffusé dans la 1ère semaine du mois de février 2020 a interpellé la recherche nationale sur des attaques sévères de maladies sur plusieurs bananeraies dans le village de Banakélédaga, région des Hauts-Bassins du Burkina Faso.
A cet effet, et conformément à ses prérogatives, le Centre National de Spécialisation en Fruits et Légumes (CNS-FL) basé à l’INERA Farako-Bâ a dépêché sur le site, une équipe pluridisciplinaire de chercheurs et techniciens afin de faire un état des lieux détaillé de la situation. Le présent rapport fait un premier point sur cette crise phytosanitaire à l’issue des analyses de laboratoire des différentes équipes disciplinaires à savoir, l’entomologie, la nématologie, la virologie, la mycologie et la bactériologie.

Objectifs
Le principal objectif de cette mission était d’identifier les causes principales du flétrissement des bananeraies à Banakélédaga. Spécifiquement, il s’agit de :
-         Recueillir davantage d’informations auprès des producteurs sur l’historique de la crise;
-         Collecter des échantillons de matériel végétal et de sol pour les analyses au laboratoire;
-         Informer avec précision l’autorité de tutelle sur les causes probables de la crise sanitaires des bananeraies de Banakélédaga;
-         Proposer des pistes de solution pour atténuer, voire endiguer le fléau et préserver cette filière, tant importante de l’économie locale.

Observations au champ
Les symptômes caractéristiques (Annexe) observés sont :
-         Jaunissement des feuilles des jeunes plants de bananier;
-         Flétrissement ou dessèchement du plant entier;
-         Brunissements, dessèchement et chute des régimes;
-         Taches nécrotiques huileuses le long de la nervure principale et aussi sur le limbe;
-         Brunissement des tissus vasculaire.
Sur la base des symptômes observés au champ, la maladie de Moko due à Ralstonia solanacearum et la fusariose ou maladie de Panama due à Fusarium oxyporium seraient à l’origine du flétrissement des bananiers.

Diagnostic au laboratoire

Test de verre d’eau
Au laboratoire, nous avons procédé à un test de verre d’eau qui permet de différencier les infections d’origine bactérienne des infections fongiques. Ce test s’est révélé positif avec la présence d’un filament blanc laiteux qui diffuse dans l’eau, confirmant l’hypothèse d’une infection d’origine bactérienne. Les échantillons négatifs au test de verre d’eau ont été traités pour la détection des champignons pathogènes.


Isolement et caractérisation de l’agent bactérien
Après la confirmation de l’infection d’origine bactérienne, nous avons procédé à l’isolement de l’agent pathogène sur milieu de culture. Après 72h d’incubation, nous avons observé des colonies pures (Annexe) identiques à celles de Ralstonia solanacearum, agent responsable du flétrissement bactérien.

Identification des champignons
Des fragments de feuilles et de racines désinfectés ont été placés dans des boîtes de Pétri contenant du papier buvard humidifié et incubé pendant 72h avec l’alternance de 12 heures d’UV et 12 heures d’obscurité à une température de 25 °C. L’identification des champignons a été réalisée à l’aide de la clé d’identification de Mathur et Kongsdal (2003).


Identification de Raltonia solanacearum par PCR Multiplex
À partir des colonies bactériennes, une suspension bactérienne a été préparée pour réaliser une PCR multiplex ciblant la région 16S-23S ITS afin de confirmer le diagnostic de Ralstonia solanacearum et aussi de déterminer le phylotype selon la méthode décrite par Fegan et Prior (2005).
De la PCR multiplex, il ressort que les symptômes observés sont dus à Ralstonia solanaearum appartenant au Phylotype II responsable de la maladie de moko sur le bananier.

Conclusion
Nous pouvons conclure sur la base des symptômes observés et des tests au laboratoire, que les dégâts observés dans les bananeraies visitées à Banakélédaga sont dus d’une part à la maladie de Moko causée par Raltonia solanacearum et d’autre part par la fusariose due à Fasarium oxyporium. Par ailleurs, d’autres champignons pathogènes ont été détectés dont Fusarium monoliforme, Myrothecium roridum, Colletotrichum spp et Mycosphaerella fijiensis. En outre, le BSV (Banana Streak virus) qui est une maladie virale a été détecté dans tous les champs prospectés.
Cependant d’autres bioagresseurs peuvent contribuer à la dissémination de ces agents pathogènes. En effet, à partir des échantillons de sol et de racines, six (06) genres principaux de nématodes connus parasites majeurs du bananier ont été détectés. Il s’agit de Helicotylenchus multicinctus, Meloidogyne spp., Radopholus similis, Pratylenchus sp., Scutellonema sp. et Rotylenchulus reniformis. L’étude entomologique n’a pas révélé de manière significative l’implication directe des insectes dans la manifestation des symptômes observés sur le bananier. Cependant, ils peuvent constituer les principaux vecteurs des bactéries, virus et champignons. Par conséquent, des études complémentaires devraient être conduites pour comprendre les interactions entre les principaux bioagresseurs.
A cours et moyen termes, il faudra mettre en place une stratégie de lutte intégrée, efficace et durable, en collaboration avec les acteurs de la filière banane et le Ministère en charge de l’Agriculture afin de réduire l’impact des bioagresseurs sur la productivité du bananier au Burkina Faso.

A propos de la maladie de moko et de la fusariose
Pour plus d’informations sur les deux maladies, consulter le lien ci-dessous :

 


Annexe

A : Taches nécrotiques huileuses sur feuille et pseudo tronc ;
B : Taches huileuses le long de la nervure principale ;
C : 1. Flétrissement du bananier, 2. Feuilles/drapeau desséché, 3. Jaunissement des feuilles ;
D : Chute du régime du bananier ;
E : Colonies pure de Ralstonia solanacearum isolées à partir des feuilles symptomatiques.
 


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