Des manguiers complètement ou
partiellement secs, c’est le constat
amer que l’on peut faire dans presque tous les vergers à travers le pays. Le
phénomène va de mal en pire et les producteurs assistent impuissants à ce
fléau.
« C’est
la désolation. On ne sait pas ce que va devenir la filière mangue dans quelques
années», a dit Traoré Seydou, producteur de mangue à Koloko,
localité située à quelques encablures de Orodara.
Autres localités, mêmes appréhensions. Souleymane
Batiga, producteur à Pô crois que le ciel va lui tomber sur la tête si rien
n’est fait. Ce dernier assiste impuissant à la perte d’une bonne partie de leur
verger familial. A ses dires, 17 arbres sont actuellement touchés par le
dessèchement dont 5 totalement morts, pour une superficie de 7 hectares.
« Comprenez notre inquiétude », a-t-il dit.
Au même moment, Bazié Eugène un septuagénaire de Réo, se trouve dans un sentiment de
découragement total. En effet, depuis l’année dernière, il a remarqué le
phénomène dans son verger, mais avait pensé que le fautif était la mauvaise
pluviométrie. « Avant les camions
venaient chercher les mangues ici. Je pouvait avoir plus de 1.000.000 FCFA par
campagne », a-t-il laissé entendre avant de regretter que cette année,
sa production n’ai été vendu qu’à 100.000 FCFA. Un calcul rapide est vite fait
et nous nous rendons compte que le problème, quelque soit son origine est plus
que alarmant. Nombreux sont les producteurs qui comme ceux cités plus haut,
sont désemparés.
En effet, les vergers
de mangues sont confrontés à de sérieuses contraintes depuis un certain moment.
Les arbres se dessèchent progressivement, des feuilles aux racines, pour
finalement se mettre hors d’usage.
Pour mieux comprendre le fléau, nous
avons approché le programme Cultures Maraîchères, Fruitières et Plantes à
Tubercules (CMF-PT) de l’Institut de l’Environnement et de Recherches Agricoles,
INERA. Le Dr Léonard Ouédraogo, phytopatologiste dans ce programme nous informera
que le dessèchement constaté sur les manguiers ces derniers temps est le
« dépérissement du manguier ».
« C’est une maladie complexe et
considéré comme un problème grave dans de nombreux pays producteurs de mangues »,
a-t-il souligné.
Le chef du programme en question, le Dr Vianney Tarpaga nous dira que le dépérissement du manguier est un nouveau fléau dans la filière mangue, au regard de l'ampleur du phénomène et du nombre de régions affectées. "C'est un gros défis posé à la recherche sur cette espèce et des équipe de pathologistes y travaillent", a-t-il laissé entendre.
Contrairement donc au problème des mouches de fruits qui connduit à des pertes par la limitation de la production de mangue commercialisables, le dépérissement entraîne la perte totale des plants de manguier et par conséquent à une réduction du verger national. C'est pourquoi le Dr Tarpaga insistera sur l'enjeu majeur qui est le découragement et l'abandon des plantations de manguier si rien n'est fait.
Le dépérissement du manguier qui se traduit par un dessèchement total ou partiel de l'arbre serait dû à une combinaison de facteurs biotiques et abiotiques. Il sévit dans toutes les zones de production au Burkina Faso, aussi bien dans les vergers que dans tous les types de plantations (plantations industrielles, vergers, manguiers à domicile). D’après une étude menée en 2015 par les Drs Sérémé Drissa et Wonni Issa, chercheurs au sein de l’INERA, le déperissement attaque toutes les variétés quelque soit leur âge. « C’est dire donc qu’aucun manguier n’est épargné », a interpellé le Dr Wonni Issa.
Le dépérissement du manguier qui se traduit par un dessèchement total ou partiel de l'arbre serait dû à une combinaison de facteurs biotiques et abiotiques. Il sévit dans toutes les zones de production au Burkina Faso, aussi bien dans les vergers que dans tous les types de plantations (plantations industrielles, vergers, manguiers à domicile). D’après une étude menée en 2015 par les Drs Sérémé Drissa et Wonni Issa, chercheurs au sein de l’INERA, le déperissement attaque toutes les variétés quelque soit leur âge. « C’est dire donc qu’aucun manguier n’est épargné », a interpellé le Dr Wonni Issa.
A
la question de savoir quels sont les symptômes de ce fléau, le Dr Wonni nous
expliquera que le dépérissement se traduit par un dessèchement total ou partiel
de l'arbre. « La maladie en elle-même évolue en quatre étapes »
a-t-il expliqué. Il s’agit de :
- L’apparition de nécroses rouges-briques sur les
feuilles ;
- Le flétrissement et le dessèchement des branches
d’un côté de l’arbre qui, avec le temps envahit toute la canopée ;
- L’exsudation de gommes brunâtres sur les branches
atteintes ainsi que les troncs ;
- La mort en quelques semaines de l’arbre atteint en
fonction de la sévérité de la maladie.
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Cycle du dépérissement du manguier ! |
Le constat mené par les
chercheurs de l’INERA est que la maladie s’exprime remarquablement en saison
sèche. Cela s’explique par le manque d’eau qui contribue à réduire la résistance du manguier face aux champignons responsables de
la maladie.
Les espèces de champignons reconnus comme étant les agents
pathogènes responsables du dépérissement dans le monde sont de la famille des
Botryosphaeriaceae en particulier Lasiodiplodia theobromae, Hendersonulla
toruluoides, Fusarium sp, Macrophoma mangifera, etc (Okigbo et
Osuindé, 2003; Woodward et al. 2005; Haougui, 2005; N’Diaye et al 2011).
Cependant, des résultats préliminaires de Sérémé et Wonni en
2015 suite à l'inventaire des maladies du manguier à travers les principales
zones de production au Burkina Faso ont permis d'identifier sur la base des
caractères morphologiques, des champignons tels que Colletotrichum gloeosporioides,
Aspergillus niger, Aspergillus flavus, Botrytis cinerea, Pestalotia
sp, Cercospora mangifera et Fusarium sp comme étant des agents
causaux.
L’ampleur actuelle de la maladie dans notre pays est telle
que si rien n’est fait, les producteurs risquent de perdre une grande partie de
leurs vergers avec pour conséquences une baisse drastique de la production et par
la même occasion, de leur revenu.
C’est pourquoi, déjà en 2015, des
producteurs de mangues, soucieux de la présence du dépérissement dans leur
verger, avaient alerté l’Institut de l’Environnement et de Recherches Agricoles
(INERA), selon les responsables de cet institut. Une équipe pluridisciplinaire avait
alors été dépêchée afin de réaliser une prospection dans les principales zones
de production. Cela a permis de constater l’ampleur du dépérissement et de
noter des incidences oscillant entre 10 % à 60 % avec des dessèchements des
feuilles de l’ordre de 25 à 30%. Les études préliminaires ont permis de collecter
et d’isoler plusieurs champignons associés aux symptômes observés. D’autres
facteurs secondaires dont la baisse de la nappe phréatique, la mauvaise
alimentation en eau et fertilisants affaiblissent le manguier et l’exposent aux
termites en le rendant sensible aux champignons.
Dès lors, des travaux ont été entrepris afin de mettre au
point un certain nombre de paquets technologiques prometteurs et les résultats
obtenus à l’issu des traitements ont permis de récupérer des arbres dépéris à
plus de 80%.
C’est dire donc que la recherche Burkinabè peut venir à bout
de cette maladie, et le Dr Wonni Issa en est convaincu. « Les causes étant bien connues, nous avons développez
des paquets technologiques pouvant éradiquer ce fléau », a-t-il souligné.
Processus de traitement des vergers affectés par
le dépérissement
Rappelons qu’il y a deux facteurs principaux responsables
du dessèchement :
- - Les facteurs primaires qui sont les champignons ;
- - Les facteurs secondaires qui sont entre autres la baisse de la nappe phréatique, les carences en nutriments, les insectes, les nématodes, mais aussi le vieillissement des arbres.
D’après le Dr Wonni, pour venir à bout de
ce fléau, la correction de ces facteurs s’impose dès lors que la maladie est déjà
introduite. « Pour cela, il sera
question de réaliser une cuvette au pied de l’arbre afin d’améliorer la
rétention en eau. Ensuite, il faudra apporter de la fumure minérale et/ou
organique dans cette cuvette, avant de traiter les parties aériennes et
souterraines de l’arbre avec des fongicides et des insecticides-nématicides. L’élagage
et la destruction des branches mortes est aussi une opération nécessaire afin
d’éviter que l’arbre traité ne soit contaminé à nouveau » toujours
selon lui.
![]() |
Quelques étapes du traitement des manguiers affectés par le dépérissement ! |
Qu’en est-il de la prévention des
vergers encore sains ?
Certes il est possible de sauver un verger déjà
contaminé. Cependant il faut reconnaître qu’il est possible de prévenir la
contamination. Pour cela, Il faut appliquer des pratiques permettant d’éviter
les causes de la maladie. Il s’agit d’améliorer l’alimentation en eau et en
nutriments des arbres, effectuer des tailles d’entretien, éviter l’introduction
des agents pathogènes dans le verger à travers l’utilisation de plants sains,
les brises vents, etc. En effet, la prévention demeure le meilleur moyen pour
éviter la maladie.
Ces paquets technologiques mises au
point par l’INERA sont une aubaine pour les producteurs de mangue. Elles permettront
de venir à bout du dépérissement du manguier, afin de redorer le blason de la
production de mangue au Burkina Faso.
Et pour accompagner l’INERA dans cette
quête, le Fond National de la Recherche et de l’Innovation pour le
Développement (FONRID) qui accompagne les projets de recherche développement a
décidé de financer le projet « Evaluation et diffusion de paquets
technologiques efficaces pour la récupération des manguiers affectés par le
dépérissement au Burkina Faso » que coordonne le Dr Wonni.
L’espoir est donc permis pour les
producteurs de mangues, en attendant la vulgarisation effective de ces
technologies de lutte contre le dépérissement du manguier dans notre pays.
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